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SOKHNA NAFISSATOU BOUSSO (DEUXIÈME PRIX AU CONCOURS INTERNATIONAL MOHAMMED VI : ‘’Ce qui me lie à Serigne Mountakha’’

SOKHNA NAFISSATOU BOUSSO (DEUXIÈME PRIX AU CONCOURS INTERNATIONAL MOHAMMED VI : ‘’Ce qui me lie à Serigne Mountakha’’

SOKHNA NAFISSATOU BOUSSO (DEUXIÈME PRIX AU CONCOURS INTERNATIONAL MOHAMMED VI DE MÉMORISATION, PSALMODIE ET EXÉGÈSE DU SAINT CORAN)

‘’Ce qui me lie à Serigne Mountakha’’

Sokhna Nafissatou Bousso, la candidate sénégalaise qui a porté haut les couleurs du Sénégal au prestigieux concours international Mohammed VI de mémorisation, psalmodie et exégèse du Saint Coran, a remporté le deuxième prix de cette compétition où il n’y avait qu’une seule femme. Un exploit salué dans tout le pays. Dans cet entretien avec ‘’EnQuête’’, cette native de Touba, qui a fait ses études aux Émirats arabes unis, nous parle de sa vie, du concours, de ses projets, mais aussi de ses relations avec le khalife général des mourides, Al Mountakha, qu’elle connaît depuis longtemps, sans oublier le secret de la population de Touba qui rafle les concours de récital de Coran dans le monde.

Quel est votre cursus scolaire ?

J’ai commencé à apprendre le Coran avec mon père. Ensuite, je suis partie dans le daara de Cheikh Abdou Khadre ici à Touba, où j’ai mémorisé le Saint Coran. C’était en 2005. Par la suite, je suis entrée à l’école française où j’ai fait deux ans en CM1 et CM2, car j’ai sauté les autres classes. En 2007, j’ai décroché mon CFEE. Je suis partie à Louga à l’Institut islamique supérieur où j’ai fait six ans. J’y ai décroché le BFEM et le bac. Après, je suis partie à Pire où j’ai intégré la faculté d’appel islamique pendant un an et demi. J’ai ensuite eu une bourse pour rejoindre les Émirats arabes unis afin de poursuivre mes études supérieures. En 2018, j’y ai obtenu ma Licence. Ainsi, je suis retournée au Sénégal où j’ai passé le concours Fastef à l’École normale supérieure. Je l’ai réussi en étant la majore de cette promotion. Par la suite, j’ai suivi une formation et l’État m’a affectée en tant que professeur d’enseignement moyen. J’enseignais jusqu’à l’ouverture de l’université Cheikhoul Khadim, où l’on m’a confié l’enseignement coranique des femmes dans les daaras, comme directrice de l’internat de l’université. L’État m’y a détachée. Parallèlement, je continue mes études en préparant mon Master et je vais bientôt soutenir, si Dieu le veut, mon mémoire. J’ai aussi appris les différentes lectures coraniques. On peut dire que je suis spécialisée en Coran. J’y fais beaucoup de recherches, et je vais partout où cela m’amène.

Quelles sont vos relations avec le khalife général des mourides qui vous a nommée à ce poste de responsabilité ?

Elles ne datent pas d’aujourd’hui. C’était avant qu’il ne devienne le khalife général des mourides. La façon dont je le connais, sur la piété et son amour pour les connaissances, fait que nous avons des relations sincères et particulières. À cela s’ajoute le fait que j’écris des poèmes en arabe. D’ailleurs, en 2016, je lui avais dédié un poème pour faire ses éloges, décrire son amour pour les connaissances et le rôle important qu’il joue à Touba. À l’époque, il n’était même pas khalife. Quand je suis retournée au Sénégal, je suis partie avec mon père le voir pour faire nos ziar, mais aussi pour lui montrer ce que j’avais écrit sur lui. Il était heureux et m’a montré une grande reconnaissance. Depuis lors, nous nous connaissons. Il me voue une grande admiration. Chaque fois qu’il voit mon père ou un de mes proches, il demande après moi. Par la suite, je suis allée le voir à plusieurs reprises. J’ai écrit un autre poème sur lui, mais chaque fois que je croise son entourage, on me dit qu’il ne cesse de demander après moi. Je lui ai présenté tous les prix que j’ai obtenus, et il n’a cessé de prier pour moi et de montrer sa fierté envers ma modeste personne. Avec mon dernier prix, il m’a reçue, et j’en ai profité pour lui présenter le dernier poème que j’ai écrit sur lui, et il l’a lu devant tout le monde.

Parlez-nous du concours : votre sélection, votre préparation et ce qui a été votre secret de réussite devant autant de monde ?

Le concours international Mohammed VI de mémorisation, psalmodie et exégèse du Saint Coran, comme vous le savez, est très difficile, car il y a une grande différence avec les autres concours dans ce domaine, où l’on demandait simplement de mémoriser le Saint Coran et de venir le réciter. Pour ce concours, en plus de cela, il faut également y ajouter les explications sous forme de Tafsir. Les membres du jury posent aussi des questions sur le langage coranique, son vocabulaire, son importance, entre autres. Quant à la préparation proprement dite, nous l’avons bien faite avec toute la rigueur nécessaire. La différence dans la préparation se trouve dans le niveau que nous avions avant. Malgré cela, pendant la phase de préparation, nous lisions beaucoup, nous nous documentions, faisions des recherches et renforcions notre relation avec le Coran. Il était aussi question d’être confiante, car ce n’était pas évident face à nos adversaires, mais aussi de la branche que j’avais choisie, qui était la plus compliquée et complexe, avec un très haut niveau. Tout le monde arabe était présent. C’est chez eux que le Saint Coran est descendu et dans leur langue, l’arabe. Il y avait aussi d’autres pays asiatiques et africains. Tout cela a fait que ce n’était pas évident. J’étais la seule femme ; les autres étaient des imams, oulémas, enseignants et autres chercheurs. Mais cela ne m’a pas ébranlée ni poussée à avoir peur, car j’avais confiance en moi et je savais que la science et la connaissance ne sont pas l’apanage de l’homme. Elles n’appartiennent à personne, sauf à celles et ceux qui s’y dirigent. Ce n’était pas non plus la première fois que je participais à ce genre de concours et que je faisais face à des sommités religieuses du monde entier tout en sortant victorieuse. La seule différence avec ce concours était son ampleur.

Quand vous avez été présentée comme la deuxième du concours, quelle a été votre première réaction ? Pour vous, qu’est-ce qui vous a fait perdre la première place ?

Quand on m’a annoncé la nouvelle que j’étais classé deuxième, ma première réaction a été d’aller dans ma chambre et de rendre grâce à Allah (SWT). J’étais tellement heureuse. J’étais ivre de joie. Un bonheur incommensurable m’envahissait. Je ne pouvais pas décrire ce que je ressentais, car je sais ce que signifie être classé deuxième dans ce concours. Pour moi, il n’y a pas de différence avec la première place, car je suis sûr que le premier m’a avancé de moins d’un point, pour ne pas dire peu. Ceci s’explique aussi par le fait que la première question qui m’a été posée m’a un peu stressée à cause des salutations. Avant d’avoir la stabilité, on se perd souvent pour ce genre de concours. En répondant à cette question, j’ai commis une petite faute. Quand le jury a tapé sur la table, je me suis automatiquement corrigée. Je pense que j’ai perdu la première place pendant ces quelques secondes. Mais cela n’empêche pas que ce prix, pour moi, est comme le premier, car je sais ce que ce lieu représente. C’est la raison pour laquelle j’étais contente, et j’ai su qu’Allah m’a glorifié d’une grande chose… Je loue Allah, car tout vient de Lui.

On vous a bien accueillie à l’aéroport, quelle sera la suite ? Avez-vous des promesses de réception ou de cadeaux de la part du Khalife et des autorités étatiques, en tête dont le président de la République ?

J’ai été accueillie à l’aéroport international Blaise Diagne bien plus que ce que j’attendais. Cela m’a fait plaisir. En même temps, quand je suis venu à Touba, c’était la même chose côté accueil, avec le complexe et l’université sous l’égide des autorités. Tout le monde était content. Je me sens honorée. Le Khalife général des mourides m’a également reçue et m’a remis un cadeau. Il m’a montré sa joie et son estime envers moi.

Pour l’État, des gens y travaillent aussi. Nous n’avons pas encore eu de promesse, mais nous sommes optimistes, car des personnes ne cessent de les interpeller dans ce sens. Il ne reste qu’à obtenir une audience.

On a constaté aussi que Touba rafle presque toutes les compétitions de Coran au niveau mondial. Quel est ton secret ?

Je pense que ce secret n’est autre qu’une prière de Serigne Touba qui a été exaucée. Serigne Touba avait prié Dieu pour que Touba soit une ville de connaissance, d’apprentissage, un lieu de référence pour chercher des connaissances islamiques dans le monde musulman, comme il l’a exprimé dans son khassida  »Matlaboul Fawzeyni ». Tout ce que Serigne Touba a écrit dans ce sens à travers ce  »khassida » ne peut pas être résumé dans des audio. Il a beaucoup prié et écrit dans ce sens. Grâce à Dieu, les habitants de cette ville s’efforcent de bénéficier de cette prière de Serigne Touba dans sa cité. C’est ainsi que vous trouverez ici des gens qui, toute leur vie, consacrent leur temps au Saint Coran entre apprendre, réciter, pratiquer et l’enseigner de la meilleure des manières. C’est à cause de cela que vous voyez de jeunes enfants mémoriser le Coran à Touba. Mémoriser le Coran est une chose, mais le vrai secret, c’est de le faire avec méthode et beauté. Cheikh Mouhamed Hassan Bousso, connu de tous dans ce pays et dans le monde, avait témoigné à Touba. Ce président du jury du concours Coran Senico avait déclaré que :  »D’ici peu, concourir avec des candidats de Touba, je ne parle pas du Sénégal, mais du monde, sera difficile lorsque cela concerne le Coran. » Il avait dit cela, et il n’est pas natif de Touba. C’est un grand connaisseur du Coran qui l’avait affirmé.

Quelles sont vos ambitions dans l’enseignement coranique et surtout envers les jeunes ?

C’est de tout faire pour augmenter le nombre d’apprenants en me basant sur mes connaissances. Je souhaite partager ce que Dieu m’a donné dans ce sens avec des milliers d’enfants. Ainsi, demain, il y aura des personnes comme moi et d’autres plus fortes que moi au niveau international. J’ambitionne de mettre en place un centre coranique qui formera ceux qui ont déjà mémorisé le Saint Coran. Il sera question des anciens aux différentes sciences qui accompagnent le Coran, à la manière de l’apprendre et de le connaître. Bref, de parler de tout ce qui tourne autour du Saint Coran. Cela permettra, dans le cadre des sciences coraniques, de remporter tous les concours comme celui que j’ai gagné, et d’autres plus prestigieux. Tout ceci dans le mais de travailler pour le Saint Coran, mais aussi dans la piété. Nous n’apprenons pas le Saint Coran pour gagner des concours, mais en tant que musulmans, nous l’apprenons parce qu’il est notre livre saint, notre constitution. Tout ce qui s’y ajoutera ne sera que bénéfique, mais ce n’était pas l’objectif.

 PAR CHEIKH THIAM

Enquête Plus

 

 

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