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Ousmane SONKO, Seleki 1886 et le lieutenant Truch, par Dr Bacary Diatta

Ousmane SONKO, Seleki 1886 et le lieutenant Truch, par Dr Bacary Diatta

À l’attention de ceux qui m’écrivent depuis hier soir pour me demander ce que c’était Seleki 1886, ce nom de lieu que Ousmane SONKO vient de mettre à la place du nom du Lieutenant Truch

Chers amis,
Chers compatriotes,

Le jeudi 17 fevier 2022, vers 18h, le Président du Pastef faisait publier cinq toponymes africaino-africains en remplacement de cinq autres qui ne ressemblaient en rien aux Africains du Sénégal. Il s’agit de l’Avenue Capitaine Javelier, la Rue Lieutenant Lemoine, la Rue France, la Rue De Gaule et la Rue Lieutenant Truch qui, désormais, deviennent, respectivement, l’Avenue du Tirailleur africain, la Rue Thiaroy 44, la Rue de l’Union africiane, la Rue de la Paix et la Rue de Seleki 1886

Grande et agréable fut ma surprise, lorsque, quelques minutes après la publication de ces toponymes et anthropotoponymes, je recevais de partout des messages dans lesquels mes amis me demandaient à quoi renvoyait Seleki 1886. Votre confiance en ma petite personne étant grande, obligation m’est faite d’essayer de vous répondre dans le détails. Bonne lecture!
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Entre le 17ème et le 20ème siècle, la France, dans toutes les villes africaines où elle régnait en maître, rendait hommage à ses MONSTRUEUX fils les « plus valeureux » en donnnant leurs noms à des avenues et/ou des rues mais aussi en les représentant à travers des statues qu’elle faisait ériger. Un tel modus operandi avait pour objectif, d’une part, de marquer, pour l’éternité, l’empreinte coloniale française en Afrique et, d’autre part, d’effacer toute trace de faits glorieux des résistants des peuples africains.

C’est ainsi que nous pouvons lire dans beaucoup de nos villes : Rue Général De Gaule, Statue Faidherbe, Avenue Jaurès, Statue Faidherbe, Rue Paytavain, Avenue Gorges Pompidou, Rue Lieutenant Lemoine, Rue Lieutenant Truch.

Ce dernier, que O. SONKO vient d’effacer définitivement de nos mémoires, fut un militaire français qui intervenait en Casmanace durant le 19ème siècle, en pleine colonisation Française.

Avant lui, durant ce même siècle, intervenaient déjà en Casamance d’autres de ses compatriotes aussi connus pour leur violence lors de leurs expéditions ayant donné lieu à plusieurs batailles parmi lesquelles nous pouvons rappeler:

■ La bataille de Hilol du 9 mars 1860, durant laquelle les populations de Casamance s’étaient vigoureusement defendues face à une colonne expéditionnaire voulant s’emparer de Hilor, ce magnifique village situé dans l’actuelle commune de Kafountine, Département de Bignona, Région de Ziguinchor.

Si cette résistance fit des dizaines des blessés graves dans les rangs français, elle retient l’attention par la mort d’une des incarnation de la violence coloniale française, le capitaine Protêt, tué par un des résistants hilolois connu sous le nom de Kuñok. Le coprs de ce capitaine fut transféré à l’île de Carabane où il fut inhumé.
(Dumasi sori: Ku mësë dem Carabane warna xam limay wax !)

■ La bataille de Thionk Essyl
Elle eut lieu le 11 mars 1860, c’est-à-dire, le surlendemain du retrait des troupes françaises de Hilol suite à leur cuisante défaite. Là, les pertes en vie humaines dans les rangs français furent plus catastrophiques. La résistance fut remarquable que le nom de Thionk est donné à une rue, la Rue Thionk, située au cœur de la capitale de notre pays.
(Kuy faral di dem Ndakaru Plateau warga xam limay wax)

■ La bataille de Sandiniery
Elle eut lieu onze mois après la bataille de Thionk, précisément le 10 février 1861, dans un village situé en Moyenne Casamance ( actuelle région de Sedihou) et opposait les troupes françaises aux hommes de l’infatigable Sounkari Yiri Camara. Deux n’ayant jamais sans trois, le revers essuyé par les troupes françaises lors des affrontements reste sans comune mesure. Comme Thionk, le nom Sandiniery est donné à une rue située au centre de la la ville Dakar. C’est la rue de Plateau où l’on vend le plus des fruits.
(Kuy jend fruit lu bari thi bír Ndakaru Plateau, warna xam limay wax)

■ La bataille de Seleki
Elle eut lieu le 1 décembre 1886 et fut déclenchée par Djignabo BADJI, à l’époque personnalité morale du Bëkiin (fetiche, en langue diola) de Seleki, qui ne supportait plus les multiples expéditions des troupes françaises en Casamance. Teinté d’une violence magistrale, l’assaut dirigé par Djignabo fit d’innombrables blessés mais surtout occasionna la mort atroce des lieutenants Renaudin, Seguin et Truch, ce dernier étant l’un des éléments français les plus perturbateurs de la zone.

En hommage à ses assassins, la France fait porter le nom de Lieutenant Truch à une rue de Ziguinchor. Une façon de dire, « vous l’avez tué, nous l’imposerons dans la mémoire collective de vos milliers de futurs petits fils » qui s’appelleront plus tard Ousmane Sonko, Docteur Cheikh Tidiane Dieye, Sékouna Diatta, Abdoulaye Baldé, Bartelemy Diaz, Guy Maruis Sagna, entre autres.

Malheureusement pour la France, en février 2022, un des petit-fils de Djignabo nommé Ousmane Sonko va devenir Maire de Ziguinchor et applique LITTÉRALEMENT l’inverse du raisonnement francais, que je représente en 7 étapes :

▪︎Le Lieutenant Truch est connu pour ses massacres en Casamance
▪︎Il fut tué par les hommes de Djignabo
▪︎Il fut tué à Seleki
▪︎Il fut tué en 1886
▪︎La France le rendit hommage en faisant afficher son nom au coeur de notre ville.
▪︎Parallélisme des formes oblige, moi, Ousmane SONKO, je rebaptise cette rue en convoquant le nom du village et l’année où cet assassin de Truch fut tué.
▪︎Ce qui donne: Seleki 1886.

Voilà, chers amis, toute la symbolique du toponyme Seleki 1886.
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PS:
Ceux qui, probablement, voudraient qu’en lieu et place de Rue Seleki 1886 soit mis Rue Djignabo BADJI, croyez-moi, je vous comprends. Mais je me permets de rappeler que cette figure de la résistance coloniale a déjà eu ses hommages depuis 1964, année à laquelle l’établissement conçu à la base comme une Ecole Normale destinée à la formation d’instituteurs, a porté son nom !
Les doublons ne servant pas à grand-chose, Rue Seleki 1886 est, à mon sens, plus expressif et plus pertinent que Rue Djignabo.

 

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