Moustapha Diakhaté est en prison pour « offense au chef de l’Etat » en vertu de l’article 80 de notre code pénal, jadis décrié comme une « hérésie »par le pouvoir Pastef lorsqu’ils étaient dans l’opposition. Il a employé le terme « gougnafiers », lors d’une émission télévisée, pour qualifier le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le Premier ministre. Ces derniers auraient fait une entorse au protocole sur une photo où ils apparaissent en sourire sur un tapis rouge, décontractés, le président de la République à gauche, celui de l’Assemblée nationale à droite et le Premier ministre au centre.
« Gougnafier » veut dire ignorant, rustre, goujat, une personne qui n’a pas les bonnes manières. C’est un mot français du 19e siècle d’origine obscure, employé pour quelqu’un qui contrevient aux bonnes manières parce qu’il les ignore. Ce n’est pas une offense vu sous l’angle d’une entorse à la bienséance basée sur l’ignorance. Il est évident que les nouveaux dirigeants du Sénégal ignorent encore certaines règles de protocole, ce qui est parfaitement normal, la chose étant toute nouvelle pour eux.
Seulement, voilà, il ne faut pas employer « gougnafier » et consorts, c’est-à-dire les mots assimilés, à l’encontre des tout-puissants nouveaux leaders Pastef du Sénégal qui ont juré d’effacer les voix discordantes qui leur parlent de manière non acceptable à leurs oreilles de nouveaux puissants. Il ne faut surtout pas les offenser, sinon c’est la prison directement.
Le procès de Moustapha Diakhaté sera intéressant à suivre le 18 juin prochain. Il devrait tourner autour de la sémantique, le vocabulaire français et les mots à choisir : si nos puissants nouveaux leaders ne se comportent pas conformément aux lois, règlements et protocoles de la République, comment s’exprimer librement sans risquer de les offenser et d’aller en prison ?
En tout état de cause, protocolairement parlant, la photo dénoncée par Moustapha Diakhaté est totalement inacceptable.








